Le premier risque, qui n'est pas illusoire si nous comprenons ce qui se passe depuis quelques

semaines, serait de croire que l'enjeu des élections à venir est de choisir simplement un homme ou

une femme, et de se laisser enfermer dans une sorte de comparaison des personnalités. L'opposition

à une politique, la contestation des aptitudes de l'un ou l'autre candidat sont légitimes et peuvent

contribuer au débat démocratique. Mais en revanche, les agressions sur l'intégrité ou les intentions

des personnes débouchent sur la haine et le mépris. Il n'y a pas de démocratie sans un véritable

respect des adversaires et un jugement honnête de leurs actes ou de leurs propositions.

Le second risque serait de nourrir l'illusion que, dans la crise actuelle, un programme, si élaboré

et si sérieux soit-il, viendra facilement à bout des difficultés auxquelles nous sommes confrontés.

(…). Il convient que les hommes et les femmes politiques affrontent leur mission avec lucidité et

franchise, pour que nous puissions espérer sérieusement qu'ils l'accomplissent avec succès.

Ce serait mépriser les électeurs que de leur faire croire que tout va s'arranger moyennant

quelques corrections à la marge. Celles et ceux qui vont briguer nos suffrages doivent avoir déjà

le courage politique de dire clairement les contraintes de l'avenir, et de montrer qu'ils sont résolus

à affronter les insatisfactions.

Le troisième risque serait de laisser croire que nous pouvons indéfiniment continuer de vivre à

crédit. En accumulant les déficits et le poids de la dette, qui obère les investissements pour

l'avenir, on consommera les chances des jeunes générations et on mettra sur leurs épaules un

fardeau insupportable. (…). Il ne suffit pas d'appeler à de nouveaux modes de vie 2. Il faut que

nous ayons tous le courage de mettre en oeuvre ces nouveaux modes de vie et que nous apprenions

à donner le signe d'une consommation plus raisonnable et plus équitable. (…). Et il est important de

rappeler que(…), le taux de l'épargne privée y est (…) particulièrement haut. (…) cela signifie que

notre pays a des ressources économiques et humaines pour investir de nouveaux chantiers, même si

ceux-ci ne sont évidemment pas sans risques.

Enfin, nous voyons que les tentations de repli et de fermeture de l'Europe ne sont pas imaginaires.

(…) nous venons de vérifier que nous pouvons être tentés de laisser certains pays européens sombrer

pour sauver notre fragile équilibre. Qu'il existe des mesures nécessaires pour aider au

développement des pays pauvres ou pour améliorer la gestion de certains pays d'Europe est

une chose. Que la solution soit de fermer nos portes pour préserver notre petite zone de

relative prospérité en est une autre. Veillons à ne pas nous laisser entraîner dans la spirale

de l'égoïsme, de l'isolationnisme ou de la xénophobie. (…) les solutions sont à chercher dans la

concertation internationale et la mise en place d'instances de régulation fiables.

Par le cardinal André Vingt-Trois,

(Extrait du discours d’ouverture de l’assemblée des évêques de France à Lourdes, le 4 novembre

2011)

1 Disponible sur le site du diocèse de Nantes : http://nantes.cef.fr

 2 Déclaration des évêques disponible sur le site: http://www.croire.com

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